Homélie du 23 juin 2024

Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ?

12ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine IV du Psautier) - Année B

Une homélie de fr. Grégoire Maertens

Homélie :
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Dans la messe de ce jour, il se passe de grandes choses : le Créateur apparaît comme « grand » quand il domine les flots de la mer. L'apôtre Paul évoque sa stupéfaction devant la grandeur de l'évènement de Jésus, Fils de Dieu, mort pour tous et donnant naissance a quelque chose de totalement neuf. 
 L'évangile enfin décrit une violente tempête suivie d'un grand calme auquel succède une grande crainte de la part des disciples du Maître endormi et réveillé en sursaut.
 Ce contexte de tempête ne reflète-t-il pas le monde tel que nous le voyons évoluer dans tous les sens depuis quelques jours, quelques mois, ou bien tout simplement depuis toujours ? Rappelons-nous Noé, Jonas, et combien d'autres !
 Des cris retentissent, on anticipe la catastrophe : «  Maître, nous sommes perdus !  »
Maître de lui-même mais sans nul doute avec un brin de tristesse, Jésus questionne : «  Pourquoi avez-vous peur ? pourquoi êtes-vous si craintifs ? N'avez-vous pas encore la foi ? Pas encore ?  »
Non, ils ne l'ont pas encore : dans l'urgence il sont perturbés : «  Qui est celui-là qui dort pendant que nous périssons ? Ça ne lui fait rien ?  » En effet, il dort, sur le coussin, à l'arrière : il n'est pas - pour le moment -à la pointe du combat. Les Apôtres, eux, n'ont pas la tête à se rappeler le psaume 120 : « Non, Il ne dort pas, il ne sommeille pas, le gardien d'Israël  ». Jésus, lui, peut-être, rêve de ce psaume : il dort mais son cœur veille.
 Et nous, n'est-ce pas indécent de nous appuyer tranquillement sur l'évangile alors que chaque jour nous apprenons le naufrage de combien de nos frères et sœurs d'Afrique, en Méditerranée ?
Il ne s'agit pas de se rassurer à bon compte mais de soutenir comme nous le pouvons ceux et celles qui sillonnent les mers pour porter secours à toutes ces personnes chassées de chez elles.

L'Evangile, quant à lui, revient en force, nous invitant à ne pas baisser les bras de la foi, à ne pas laisser les tempêtes médiatiques nous submerger en nous détournant de l'essentiel. Jésus nous adresse à nous personnellement ces questions lancées jadis aux Apôtres : «  Pourquoi être si craintifs ? N'avez-vous pas encore la foi ? Ne savez-vous pas que «  l'amour du Seigneur n'est pas épuisé, que sa compassion chaque matin se renouvelle ? Ne savez-vous pas qu'un monde nouveau est déjà né, un monde dont vous n'avez pas idée. Ce n'est pas en vain que j'ai traversé pour vous la tempête de la Croix : soyez donc centrés sur la lumière et la joie de ma résurrection.  »
 Il faut aller plus loin. Ce serait trop facile de s'arrêter à cette merveilleuse nouvelle de Jésus qui nous a sauvés une fois pour toutes, mais comme de l'extérieur. Nous ne sommes pas dispensés d'une démarche toute personnelle : aller vers celui dont on nous dit constamment qu'il est «  avec nous  ». Cette démarche c'est la prière, rencontre intime avec Celui qui, à l'intérieur de nous -mêmes, communie à nos angoisses, nos souffrances, nos joies et nos peines. Etty Hillesum, cette jeune fille hollandaise, convertie, déportée et morte dans les camps de la mort est devenue, depuis la découverte de ses notes personnelles, l'exemple stimulant et lumineux d'une chrétienne pour qui Jésus était devenu l'inspirateur quotidien de son dévouement jamais découragé parmi les déportés du camp de Westerbork.

Cette lumière, notre compatriote James Ensor l'a peinte merveilleusement dans une toile intitulée «  Jésus apaisant la tempête  ». Au milieu d'un déchainement multicolore de vent et de flots, voici un frêle esquif où s'agitent une douzaine d'hommes, tandis qu'à la proue, Jésus brandit un objet - un livre... un flambeau ?- d'où jaillissent des rayons de lumière qui viennent donner à la scène tragique un souffle d'espérance.
 Frères et sœurs, sur la coupe eucharistique, sur le pain eucharistique, le Seigneur paraît sommeiller : être troublé, avoir peur, c'est normal, c'est humain. Avoir l'audace de la foi, le calme de l'espérance, la persévérance de charité, c'est chrétien !

Amen !

Amen !

 

Ici s'arrêtera l'orgueil de tes flots !

Le Seigneur s'adressa à Job du milieu de la tempête et dit : « Qui donc a retenu la mer avec des portes, quand elle jaillit du sein primordial ; quand je lui mis pour vêtement la nuée, en guise de langes le nuage sombre ; quand je lui imposai ma limite, et que je disposai verrou et portes ? Et je dis : ?Tu viendras jusqu'ici ! tu n'iras pas plus loin, ici s'arrêtera l'orgueil de tes flots !? »

- Parole du Seigneur.

Jb 38, 1.8-11

Qu'ils rendent grâce au Seigneur de son amour, qu'ils offrent des sacrifices d'action de grâce, ceux qui ont vu les ?uvres du Seigneur et ses merveilles parmi les océans.

Il parle, et provoque la tempête, un vent qui soulève les vagues : portés jusqu'au ciel, retombant aux abîmes, leur sagesse était engloutie.

Dans leur angoisse, ils ont crié vers le Seigneur, et lui les a tirés de la détresse, réduisant la tempête au silence, faisant taire les vagues.

Ils se réjouissent de les voir s'apaiser, d'être conduits au port qu'ils désiraient. Qu'ils rendent grâce au Seigneur de son amour, de ses merveilles pour les hommes.

106 (107), 21a.22a.24, 25-26a.27b, 28-29, 30-31

Nous ne comprenons plus le Christ d'une manière simplement humaine

Frères, l'amour du Christ nous saisit quand nous pensons qu'un seul est mort pour tous, et qu'ainsi tous ont passé par la mort. Car le Christ est mort pour tous, afin que les vivants n'aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux. Désormais nous ne regardons plus personne d'une manière simplement humaine : si nous avons connu le Christ de cette manière, maintenant nous ne le connaissons plus ainsi. Si donc quelqu'un est dans le Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s'en est allé, un monde nouveau est déjà né.

- Parole du Seigneur.

2 Co 5, 14-17

Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ?

Ce jour-là, le soir venu, Jésus dit à ses disciples : « Passons sur l'autre rive. » Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d'autres barques l'accompagnaient. Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. Lui dormait sur le coussin à l'arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? » Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N'avez-vous pas encore la foi ? » Saisis d'une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »

- Acclamons la Parole de Dieu.

Mc 4, 35-41