Une homélie de fr. Grégoire Maertens
Notre maître à penser, à agir, à croire, c'était, hier, la Vierge Marie. Aujourd'hui il s'agit d'un tout autre personnage : une Cananéenne, qui fait partie du cortège des gens « non conformes », non soumis à la religion officielle, y compris ceux dont Jésus fait les héros de ses paraboles : Marie Madeleine, Zachée, le Centurion romain, le publicain, le fils prodigue, le bon larron-..Comment se fait-il que Jésus se laisse toucher par eux au point de se dire : non je ne peux pas les renvoyer comme çà !
Qu'y a-t-il d'interpellant dans cette scène touchante, pour l'Eglise, pour le monde d'aujourd'hui ? Cette Libanaise, venue de Tyr et de Sidon, que vient elle nous dire ? Il me semble qu'elle vient nous apprendre à prier, à adorer et à croire. C'est presque une leçon de liturgie !
Elle commence par le Kyrie : prend pitié de moi Seigneur. Nous n'avons pas fait autre chose. Elle poursuit par l'adoration exprimée par une prosternation : nous n'avons pas fait cela mais nous avons chanté le Gloria : « Nous te louons, nous te bénissons, nous t'adorons ! » Et, avec le psalmiste nous avons chanté le psaume 66 : « Que toute la terre adore le Seigneur » ! Enfin la Cananéenne nous enseigne à croire en ce Dieu qui se penche vers les humbles. Sa foi déplace des montagnes : elle a l'audace de reprendre les paroles du Maître pour leur donner un sens positif : « justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leur maître ! »
De cette Cananéenne, si nous apprenions la patience ! Elle qui ne s'est pas découragée devant le mutisme de Jésus ; elle qui n'a pas cru les Apôtres capables de convaincre Jésus de la renvoyer ; elle qui a adoré Celui qu'elle aurait pu juger insensible à ses appels en faveur de sa fille en détresse. Bref : elle a fait « craquer » Jésus par une humilité et une confiance qui l'apparente à la Vierge Marie : « Qu'il me soit fait selon ta parole ! » Pour elle se réalise la prophétie: « Les étrangers qui se sont attachés au Seigneur-je les comblerai de joie » Is.56
Mes Soeurs, mes frères, Jésus se trouvait face à cette femme dont l'enfant était tourmentée par un démon ; ces tourments, ils sont les nôtres, aujourd'hui en nous, autour de nous : que de choses moches, dramatiques, sinistres, injustes, avec un goût d'échec et de mort, et, en même temps, que de réalisations merveilleuses, joyeuses, heureuses avec un goût de réussite, de vie et d'Esprit-Saint ! Notre époque aura-t-elle l'audace, l'humilité de réapprendre à prier, à adorer le Père de Jésus dont le nom est miséricorde ? L'Eucharistie, n'est-ce pas comme les miettes du Pain que Dieu nous servira dans son Royaume, son amour distillé à petites doses jusqu'au temps de l'accomplissement ?
Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse
Que son visage se fasse souriant !
Ainsi parle le Seigneur : Observez le droit, pratiquez la justice, car mon salut approche, il vient, et ma justice va se révéler.
Les étrangers qui se sont attachés au Seigneur pour l'honorer, pour aimer son nom, pour devenir ses serviteurs, tous ceux qui observent le sabbat sans le profaner et tiennent ferme à mon alliance, je les conduirai à ma montagne sainte, je les comblerai de joie dans ma maison de prière, leurs holocaustes et leurs sacrifices seront agréés sur mon autel, car ma maison s'appellera « Maison de prière pour tous les peuples. »
- Parole du Seigneur.
Is 56, 1.6-7
Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, que son visage s'illumine pour nous ; et ton chemin sera connu sur la terre, ton salut, parmi toutes les nations.
Que les nations chantent leur joie, car tu gouvernes le monde avec justice ; tu gouvernes les peuples avec droiture, sur la terre, tu conduis les nations.
La terre a donné son fruit ; Dieu, notre Dieu, nous bénit. Que Dieu nous bénisse, et que la terre tout entière l'adore !
Ps 66 (67), 2-3, 5, 7-8
Frères, je vous le dis à vous, qui venez des nations païennes : dans la mesure où je suis moi-même apôtre des nations, j'honore mon ministère, mais dans l'espoir de rendre jaloux mes frères selon la chair, et d'en sauver quelques-uns. Si en effet le monde a été réconcilié avec Dieu quand ils ont été mis à l'écart, qu'arrivera-t-il quand ils seront réintégrés ? Ce sera la vie pour ceux qui étaient morts !
Les dons gratuits de Dieu et son appel sont sans repentance. Jadis, en effet, vous avez refusé de croire en Dieu, et maintenant, par suite de leur refus de croire, vous avez obtenu miséricorde ; de même, maintenant, ce sont eux qui ont refusé de croire, par suite de la miséricorde que vous avez obtenue, mais c'est pour qu'ils obtiennent miséricorde, eux aussi. Dieu, en effet, a enfermé tous les hommes dans le refus de croire pour faire à tous miséricorde.
- Parole du Seigneur.
Rm 11, 13-15.29-32
En ce temps-là, Jésus se retira dans la région de Tyr et de Sidon. Voici qu'une Cananéenne, venue de ces territoires, disait en criant : « Prends pitié de moi, Seigneur, fils de David ! Ma fille est tourmentée par un démon. » Mais il ne lui répondit pas un mot. Les disciples s'approchèrent pour lui demander : « Renvoie-la, car elle nous poursuit de ses cris ! » Jésus répondit : « Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël. » Mais elle vint se prosterner devant lui en disant : « Seigneur, viens à mon secours ! » Il répondit : « Il n'est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. » Elle reprit : « Oui, Seigneur ; mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. » Jésus répondit : « Femme, grande est ta foi, que tout se passe pour toi comme tu le veux ! » Et, à l'heure même, sa fille fut guérie.
- Acclamons la Parole de Dieu.
Mt 15, 21-28