Une homélie de fr. Yves de patoul
En ces temps difficiles, où nous sommes tous confrontés à toute sorte de problèmes dont l'énumération elle-même n'est pas aisée tellement ces problèmes sont nombreux, complexes et différents les uns des autres : une crise sanitaire qui est derrière nous mais qui refait surface de temps à autre, une crise climatique qui s'aggrave d'année en année jusqu'à nous priver des éléments les plus essentiels comme l'eau indispensable pour les fruits et les légumes, lesquels deviennent hors prix, une crise migratoire, c'est-à-dire un flux de réfugiés politiques qui s'amplifie à la mesure des autres crises, et enfin la guerre en Ukraine avec tout son cortège de conséquences économiques et sociales dont l'afflux de réfugiés supplémentaires, il est salutaire d'entendre le message simple et clair de Jean le Baptiste : ne péchez plus, prenez votre vie en main, convertissez-vous mais surtout n'attendez pas la promesse faite à Abraham, n'attendez pas midi à quatorze heures. Ainsi vous serez dignes de recevoir celui qui vous baptisera dans l'Esprit, le Messie de Dieu Jésus Christ, le prince de la paix. « Avec lui, il ne se fera plus rien de mauvais ni de corrompu sur la montagne sainte ; car la connaissance du Seigneur remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer ».
Jean Baptiste nous plait par la simplicité de sa vie au milieu du désert, loin de tous les tracas de la vie tumultueuse de la cité. Il ne dépend de personne ; c'est un décalé comme on dirait aujourd'hui dans un sens laudatif. Il est comme le premier hippie fuyant la ville, voire la civilisation. Il est habillé pauvrement, sa nourriture est frugale. Il est le premier écolo de l'ère nouvelle. Et par-dessus tout, il ne parle pas pour ne rien dire : il interpelle vivement ceux qui venaient le voir et l'entendre, ceux qui étaient venus l'interroger. Il est de ces personnages charismatiques qui attirent tout le monde, pauvres et riches, les soldats comme les publicains et les pharisiens. Ces derniers sont insultés : « Race de vipères, qui vous a appris à fuir la colère qui vient, produisez des fruits qui expriment votre conversion, ... sinon vous serez abattus comme des arbres qui ne produisent plus de bons fruits »
À tous il délivre un message d'espérance : « Convertissez-vous car le Royaume des cieux est tout proche. Il vient après moi celui qui vous baptisera dans l'eau et le feu. Il est plus grand que moi, je ne suis pas digne de défaire la courroie de ses sandales ». Jean le Baptiste se situe dans la lignée des prophètes. Isaïe en effet tenait un message d'espérance comme nous l'avons entendu, mais relisons encore une fois le beau message qu'il adressait : « un rejeton de la souche de David jaillira. Sur lui reposera l'Esprit du Seigneur. ... Il ne jugera pas sur les apparences, il jugera les petits avec justice, il se prononcera en faveur des humbles du pays. ... Le loup habitera avec l'agneau ; le léopard se couchera près de l'agneau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble. ... Le lion comme le bœuf mangera du fourrage, le nourrisson s'amusera sur le nid du cobra ; sur le nid de la vipère l'enfant étendra la main. (Et pour tout résumer) Il n'y aura plus de mal ni de corruption sur toute ma montagne sainte ». Toutes les espèces opposées qui par nature se tournent le dos ou se dévorent entre elles, elles vivront en paix. Ce sera le paradis retrouvé.
Et le psaume 71 que nous avons chanté après cette lecture (celle d'Isaïe) renchérissait : « En ces jours-là, fleurira la justice, grande paix jusqu'à la fin des lunes ; il délivrera le pauvre qui appelle et le malheureux sans recours, en lui que soient bénies toutes les familles de la terre ; que tous les pays le disent bienheureux ». Toutes ces réalités qui sont évoquées avec tant de poésie devraient nous emballer. Nous pensons peut-être que ce sont seulement des mots, mais en réalité elles ont été réalisées par le Christ au cours de sa vie terrestre parmi nous. Bien sûr le poète du 8e siècle avant Jésus Christ y avait mis du sien parce que, à son époque, les hommes de Dieu s'exprimaient en oracles inspirés par l'Esprit qui avait en point de mire très lointain le Messie de Dieu, Jésus Christ. Isaïe en l'occurrence exprimait confusément l'universelle réconciliation des hommes et des peuples en la personne du Messie. Il faut dire qu'il avait à faire face à une situation assez désespérée en Israël (le royaume voisin d'Assyrie s'apprêtait à tomber sur lui) : il a esquissé la figure d'un sauveur bien plus grand que celui de son propre peuple. « Sur lui reposera un esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur »
La situation actuelle reste toujours la même : nous croyons que le Christ va sauver tous les hommes et les peuples de l'oppression du péché. Pour cela, nous prêchons la Bonne nouvelle à tous les hommes, nous ne cessons pas de nous convertir nous-mêmes, sans quoi nous ne pourrions jamais annoncer une vraie bonne nouvelle. Prêcher la Bonne nouvelle, ce n'est rien d'autre que témoigner de l'esprit du Christ dans la fidélité à sa parole.
L'extrait de l'Epitre de saint Paul aux Romains nous dit encore une fois, plutôt sous forme d'exhortation, que le Christ nous rassemble tous en espérance, dans l'unité d'une même foi : « Que le Dieu de la persévérance et du réconfort vous donne d'être d'accord les uns avec les autres selon le Christ Jésus. ... Accueillez-vous donc les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis pour la gloire de Dieu ». L'Apôtre Paul souligne peut-être davantage la nécessité d'une vie fraternelle, d'un salut qui s'acquiert dans l'amour mutuel sur lequel saint Jean insistera encore davantage.
Revenons un instant à notre introduction : la question qui nous est posée en ce deuxième dimanche de l'Avent c'est, me semble-t-il, celle de savoir comment nous allons vivre notre solidarité avec les nombreuses personnes en détresse par ces temps difficiles, les sinistrés de cette guerre affreuse aux confins de notre continent, les sinistrés de la crise économique, tous ceux qui ne savent plus se payer leur chauffage, qui doivent faire des coupes sombres dans leur budget pour se nourrir, pour se vêtir, pour se divertir. L'occasion vous en sera donnée dimanche prochain avec la quête organisée par Entraide et Fraternité. En attendant, je vous suggère de faire des dons à la Croix-Rouge ou aux banques alimentaires dont les numéros de compte sont faciles à trouver. On peut vous aider si vous en faites la demande.
Vivons ensemble durant cette période de l'Avent dans un élan de réelle solidarité dans l'espérance de se rapprocher d'un monde nouveau où toute colline sera abaissée, où les chemins seront rendus droits. Convertissons-nous, abandonnons nos mauvaises habitudes, prenons de bonnes résolutions de partage, d'entraide et de solidarité.
En ce jour-là, un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l'esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur - qui lui inspirera la crainte du Seigneur. Il ne jugera pas sur l'apparence ; il ne se prononcera pas sur des rumeurs. Il jugera les petits avec justice ; avec droiture, il se prononcera en faveur des humbles du pays. Du bâton de sa parole, il frappera le pays ; du souffle de ses lèvres, il fera mourir le méchant. La justice est la ceinture de ses hanches ; la fidélité est la ceinture de ses reins.
Le loup habitera avec l'agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira. La vache et l'ourse auront même pâture, leurs petits auront même gîte. Le lion, comme le b?uf, mangera du fourrage. Le nourrisson s'amusera sur le nid du cobra ; sur le trou de la vipère, l'enfant étendra la main. Il n'y aura plus de mal ni de corruption sur toute ma montagne sainte ; car la connaissance du Seigneur remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer.
Ce jour-là, la racine de Jessé sera dressée comme un étendard pour les peuples, les nations la chercheront, et la gloire sera sa demeure.
- Parole du Seigneur.
Is 11, 1-10
Dieu, donne au roi tes pouvoirs, à ce fils de roi ta justice. Qu'il gouverne ton peuple avec justice, qu'il fasse droit aux malheureux !
En ces jours-là, fleurira la justice, grande paix jusqu'à la fin des lunes ! Qu'il domine de la mer à la mer, et du Fleuve jusqu'au bout de la terre !
Il délivrera le pauvre qui appelle et le malheureux sans recours. Il aura souci du faible et du pauvre, du pauvre dont il sauve la vie.
Que son nom dure toujours ; sous le soleil, que subsiste son nom ! En lui, que soient bénies toutes les familles de la terre ; que tous les pays le disent bienheureux !
Ps 71 (72), 1-2, 7-8, 12-13, 17
Frères, tout ce qui a été écrit à l'avance dans les livres saints l'a été pour nous instruire, afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures, nous ayons l'espérance. Que le Dieu de la persévérance et du réconfort vous donne d'être d'accord les uns avec les autres selon le Christ Jésus. Ainsi, d'un même c?ur, d'une seule voix, vous rendrez gloire à Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ.
Accueillez-vous donc les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis pour la gloire de Dieu. Car je vous le déclare : le Christ s'est fait le serviteur des Juifs, en raison de la fidélité de Dieu, pour réaliser les promesses faites à nos pères ; quant aux nations, c'est en raison de sa miséricorde qu'elles rendent gloire à Dieu, comme le dit l'Écriture : C'est pourquoi je proclamerai ta louange parmi les nations, je chanterai ton nom.
- Parole du Seigneur.
Rm 15, 4-9
En ces jours-là, paraît Jean le Baptiste, qui proclame dans le désert de Judée : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. » Jean est celui que désignait la parole prononcée par le prophète Isaïe : Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers.
Lui, Jean, portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage. Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain se rendaient auprès de lui, et ils étaient baptisés par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés. Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens se présenter à son baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit digne de la conversion. N'allez pas dire en vous-mêmes : ?Nous avons Abraham pour père' ; car, je vous le dis : des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu.
Moi, je vous baptise dans l'eau, en vue de la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu. Il tient dans sa main la pelle à vanner, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera son grain dans le grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s'éteint pas. »
- Acclamons la Parole de Dieu.
Mt 3, 1-12