Une homélie de fr. Dieudonné Dufrasne
Cette scène évangélique, brève de cinq versets seulement, est très animée et puissamment visuelle. Elle décrit deux mouvements de foule, deux foules, toutes les deux importantes, l'une « turba copiosa » , précise le texte -foule copieuse; l'autre « turba multa » -une foule qui est multitude.
Ces deux foules vont en sens contraire: l'une entre dans la ville, l'autre sort de la ville. Et elles vont nécessairement se rencontrer, parce qu'il n'y a qu'un seul endroit où l'on peut entrer ou sortir, c'est par la porte de la ville, obligatoirement étroite à l'époque.
Alors quoi? Une des deux foules devra bien céder la priorité à l'autre. Un agent de police serait ici bien utile, pour autant qu'il puisse imposer son autorité. Suspens- Et voici l'inattendu, l'impossible qui se réalise:
Jésus se détache de son groupe. Il se fend calmement un passage.
Va droit à la civière, la touche puissamment pour arrêter les porteurs.
Prononce une seule phrase avec force: « Jeune-homme, je te l'ordonne, lève-toi » - Et le jeune homme se lève.
On se pose alors la question: d'où ce Jésus tire-t-il son audace, où puise-t-il cette puissance de Vie?
L'évangéliste luc en donne sobrement mais intensément la réponse: en voyant la maman du jeune homme, dans la désolation et les larmes, « il fut pris de pitié pour elle » .
Mais cette traduction française est trop faible pour rendre la force du texte grec:
« Il fut pris dans ses viscères, il fut retourné dans le ventre, dans un élan de miséricorde compatissante » .
C'est déjà ainsi que le Premier testament juif parlait de Dieu lorsqu'il voyait son Peuple en perdition, en danger de mort.
C'était ainsi que le grand Prêtre Zacharie, prédisait que son fils Jean le Baptiste ouvrirait la route au messie des derniers temps qui apporterait le salut au monde. ce salut que nous obtenons, chanta-t-il, « per viscera misericordiae Dei, nostri » , - « grâce aux viscères de miséricorde de notre Dieu » ; un texte que nous chantons tous les matins à l'office des Laudes.
Si certaines féministes se plaignent de ce qu'il n'y a que des hommes dans la Sainte Trinité, elles peuvent être assurées de ce que le sentiment maternel est ancré dans le coeur du Père et dans celui de son Fils qui, durant son séjour sur la terre, eut constamment les entrailles retournées par les souffrances et les misères de ses soeurs et frères en humanité.
Que pouvons-nous retirer de cette méditation pour notre vie quotidienne de croyants?
D'abord une fresque évocatrice de notre société peu différente d'ailleurs de celle de tous les temps. Jérôme Bosch aurait pu peindre somptueusement cette rencontre des deux cortèges; celui où un cadavre est au centre, accompagné de visages ternes, bouleversés, en pleurs, marchant vers un cimetière; et l'autre où est au centre un Super-Vivant, accompagné de visages radieux du bonheur des Béatitudes des pauvres de coeur.
Saint-Luc, qui est le seul des quatre évangélistes à rapporter cet évènement de la réanimation d'un mort, a écrit cette scène cinquante ans après Jésus, qu'il n'a pas connu. Pour lui, ce qui importe, c'est le sens de l'avenir de l'Eglise naissante dans dans les régions de culture grecque païenne, où il vit en témoin, non pas d'un Jésus palestinien, mais du Christ ressuscité, dont on doit découvrir les signes de sa présence dans les premières communautés chrétiennes, dont la seule force de persuasion est l'amour, non pas l'amour érotique des païens, mais l'amour Agapè, l'amour de Charité qui se pratique chez ceux dont les entrailles sont remuées de compassion pour les misères du monde.
Si on veut parler de miracles, cela ne peut être que des miracles dont sont capables ceux et elles qui puisent dans l'eucharistie le secret de pouvoir mettre fin à tous les cortèges funèbres qui traversent nos villes et la planète.
« Voici le pain, mon Corps brisé pour vaincre la haine et la mort;
Voici le vin, mon sang versé pour abreuver la terre d'amour et de Vie éternelle »
Faites cela en mémoire de moi
En ces jours-là, le fils de la femme chez qui habitait le prophète Élie tomba malade ; le mal fut si violent que l'enfant expira. Alors la femme dit à Élie : « Que me veux-tu, homme de Dieu ? Tu es venu chez moi pour rappeler mes fautes et faire mourir mon fils ! » Élie répondit : « Donne-moi ton fils ! » Il le prit des bras de sa mère, le porta dans sa chambre en haut de la maison et l'étendit sur son lit. Puis il invoqua le Seigneur : « Seigneur, mon Dieu, cette veuve chez qui je loge, lui veux-tu du mal jusqu'à faire mourir son fils ? » Par trois fois, il s'étendit sur l'enfant en invoquant le Seigneur : « Seigneur, mon Dieu, je t'en supplie, rends la vie à cet enfant ! » Le Seigneur entendit la prière d'Élie ; le souffle de l'enfant revint en lui : il était vivant ! Élie prit alors l'enfant, de sa chambre il le descendit dans la maison, le remit à sa mère et dit : « Regarde, ton fils est vivant ! » La femme lui répondit : « Maintenant je sais que tu es un homme de Dieu, et que, dans ta bouche, la parole du Seigneur est véridique. »
- Parole du Seigneur.
1 R 17, 17-24
Quand j'ai crié vers toi, Seigneur, mon Dieu, tu m'as guéri ; Seigneur, tu m'as fait remonter de l'abîme et revivre quand je descendais à la fosse.
Fêtez le Seigneur, vous, ses fidèles, rendez grâce en rappelant son nom très saint. Sa colère ne dure qu'un instant, sa bonté, toute la vie.
Avec le soir, viennent les larmes, mais au matin, les cris de joie ! Tu as changé mon deuil en une danse, mes habits funèbres en parure de joie !
Que mon c?ur ne se taise pas, qu'il soit en fête pour toi ; et que sans fin, Seigneur, mon Dieu, je te rende grâce !
Ps 29 (30), 3-4, 5-6ab, 6cd.12, 13
Frères, je tiens à ce que vous le sachiez, l'Évangile que j'ai proclamé n'est pas une invention humaine. Ce n'est pas non plus d'un homme que je l'ai reçu ou appris, mais par révélation de Jésus Christ. Vous avez entendu parler du comportement que j'avais autrefois dans le judaïsme : je menais une persécution effrénée contre l'Église de Dieu, et je cherchais à la détruire. J'allais plus loin dans le judaïsme que la plupart de mes frères de race qui avaient mon âge, et, plus que les autres, je défendais avec une ardeur jalouse les traditions de mes pères. Mais Dieu m'avait mis à part dès le sein de ma mère ; dans sa grâce, il m'a appelé ; et il a trouvé bon de révéler en moi son Fils, pour que je l'annonce parmi les nations païennes. Aussitôt, sans prendre l'avis de personne, sans même monter à Jérusalem pour y rencontrer ceux qui étaient Apôtres avant moi, je suis parti pour l'Arabie et, de là, je suis retourné à Damas. Puis, trois ans après, je suis monté à Jérusalem pour faire la connaissance de Pierre, et je suis resté quinze jours auprès de lui. Je n'ai vu aucun des autres Apôtres sauf Jacques, le frère du Seigneur.
- Parole du Seigneur.
Ga 1, 11-19
En ce temps-là, Jésus se rendit dans une ville appelée Naïm. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu'une grande foule. Il arriva près de la porte de la ville au moment où l'on emportait un mort pour l'enterrer ; c'était un fils unique, et sa mère était veuve. Une foule importante de la ville accompagnait cette femme. Voyant celle-ci, le Seigneur fut saisi de compassion pour elle et lui dit : « Ne pleure pas. » Il s'approcha et toucha le cercueil ; les porteurs s'arrêtèrent, et Jésus dit : « Jeune homme, je te l'ordonne, lève-toi. » Alors le mort se redressa et se mit à parler. Et Jésus le rendit à sa mère.
La crainte s'empara de tous, et ils rendaient gloire à Dieu en disant : « Un grand prophète s'est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple. » Et cette parole sur Jésus se répandit dans la Judée entière et dans toute la région.
- Acclamons la Parole de Dieu.
Lc 7, 11-17